La réalité en dit long sur un rythme de vie précaire. Aux confins du Nord-Ouest, la vague de froid et de neige multiplie les galères et laisse entraîner les autochtones dans le gouffre de la misère.
En ces temps de changement climatique, on n’aura plus parlé du cycle régulier des saisons. Et encore moins habituel tel qu’on l’a déjà connu. Ainsi, l’hiver météorologique ne fait que commencer et pourrait durer plus que prévu. Après une trêve naturelle si éphémère que de fortes pluies se sont abattues sur le Nord-Ouest, avec une nouvelle vague de froid glacial.
Il neige, ça plaît.. !
Il neige de nouveau sur le nord-ouest. Les localités du Kef, de Aïn Draham, Ghardimaou et bien d’autres campagnes perchées sur les hauteurs, se sont, encore une fois, réveillées toutes couvertes d’un manteau blanc. Et si pour ces autochtones indigents, la neige semble toujours être un invité indésirable, elle ne l’est pas pour les groupes des visiteurs excursionnistes. Celles et ceux qui viennent se distraire et se prendre en photo, sur les chaussées et dans des endroits enneigés. Autrefois, et comme pas mal de fois, Ain Draham, ce haut village de neige, s’est érigé en destination fort prisée. Et c’est là où débarquent, pendant des jours, les caravanes de loisirs. Ainsi, un week-end à la neige n’est, en fait, qu’une partie de plaisir. Les hôtels de la région et ceux de Tabarka affichent, parfois, complet, avec un taux d’occupation dépassant de loin cent pour cent. Ce qui semble, relativement, galvaniser la dynamique économique locale et briser, un tant soit peu, la grisaille de la vie quotidienne. Pour les enfants, venus en familles de divers horizons, c’est bien l’euphorie. Et faire des bonhommes de neige, ça plaît à tout le monde.
Dans le gouffre de la misère
En hiver, la fête des neiges est une aubaine à ne pas manquer. Voire une manne céleste à plus d’un titre. Mais, gare aux nuances ! Cette beauté de la nature n’a pas toujours les mêmes significations. L’effet immédiat de sa loi, non plus. Et parfois, son beau visage fait grise mine. Sous un tel manteau blanc, la réalité en dit long sur un rythme de vie précaire. Là-bas, aux confins du Nord-Ouest, la vague de froid et de neige multiplie les galères et laisse entraîner les habitants locaux dans le gouffre de la misère. Ces aléas du climat les mettent souvent à rude épreuve. Et l’infrastructure routière, devenue quasiment hors d’usage, leur impose un confinement forcé, coincés dans des habitations menaçant ruine. Et encore moins dotées du strict nécessaire. D’autant plus que les pénuries des denrées et produits vitaux alourdissent leur fardeau. L’hiver sévère leur réserve des surprises désagréables.
De la souffrance qui se tapit dans les coins les plus sombres. Cela arrive beaucoup plus qu’on ne le pense. Au su et au vu de tous, mais l’Etat est aux abonnés absents. Cette nonchalance pousse les gens à souffrir en silence. Ceux dont on connaît les maux et auxquels on tarde à leur tendre la main. Et le temps paraît très long comme un jour sans pain. Il livre toute une population si lésée et fragilisée à l’abandon. Jeunes et moins jeunes sont, déjà, laissés pour compte. Dans ces recoins du pays les plus marginalisés, ici n’est pas comme ailleurs, dans des localités bien nanties. Ces clivages sociaux ne datent pas d’aujourd’hui. La précarité dans laquelle se trouve le Nord-Ouest n’est guère une fatalité. Mais un fiasco politique qui a généré une telle crise socioéconomique. A cela s’ajoute une menace climatique qui pèse sur son système écologique.
Tout projet parti en fumée
En dépit de son potentiel éco-touristique si riche et varié, le Nord-Ouest n’a pas pu, jusqu’à nos jours, rattraper les temps perdus. A Jendouba, agriculteurs et hôteliers de la région n’ont pas manqué de dénoncer l’état critique des lieux. C’est que les promesses des gouvernements successifs ne répondent pas à leurs attentes. Certains professionnels du tourisme s’étaient, alors, trouvés obligés de mettre la clé sous le paillasson. Et jusque-là, l’on n’a pas donné suite à leurs principales revendications. Alors qu’il y avait eu, depuis si longtemps, une volonté de faire de la région un pôle touristique et de Aïn Draham, mais aussi de Tabarka, une destination privilégiée. En vain, tout ce projet était parti en fumée.
L’on revient, ici, sur l’initiative de feu Belgacem Ouechtati, cet investisseur qui avait tenu bon, sans avoir vu des jours meilleurs. Faute d’un budget estimé à 5 millions de dinars, son projet d’animation à vocation touristique «Lezard vert» est tombé à l’eau. Pourtant, il semblait que ce train spécifique aurait dû faire le tour de trois gares déjà abandonnées, en en faisant des stations de repos et de restauration dynamiques. Ainsi, l’homme était un beau rêveur, mais il décéda sans avoir vu son rêve réalisé. Son train ne sifflera jamais !